Piano solo
L’art de Jean-Michel Pilc est le fruit d’une imagination débordante et d’une sensibilité intrépide à l’exploration musicale. Il est autodidacte en tant que pianiste et compositeur. Il en découle une liberté, une vue dégagée de la palette de la musique et de l’harmonie. Sur son dernier album solo, Symphony, Pilc réalise pleinement cette intrépidité et cette liberté.
Crédits
Sortie le 17 février 2023
Label : Justin Time Records
Produit par Jean-Michel Pilc et Xose Miguélez
Enregistré par José Trincado et Nuno Couto au Cara-ojm Studios, Matosinhos, Portugal, le 28 novembre 2021.
Mixage et masterisation par José Trincado aux Savik Sound Studios, Galice, Espagne
Œuvre d’art d’Ana Tenorio. Police de titre par Marcos Dopico
Couverture réalisée par Paula Solveira
Critique
Le 28 novembre 2021, à l’issue d’une session d’enregistrement de deux jours pour Contradictio (Origine, 2022) du saxophoniste galicien Xose Miguelez aux studios CARA-OJM de Matosinhos, au Portugal, le pianiste Jean-Michel Pilc a un peu de temps devant lui. Et avec un magnifique Steinway juste devant lui, une belle acoustique dans la pièce et l’ingénieur José Trincado prêt à enregistrer, il s’est avéré que c’était l’occasion parfaite d’explorer le moment. Le résultat, une déclaration étonnante sur les complexités subliminales et la beauté du devenir, en dit long sur un musicien doué qui n’est pas encombré par le poids des attentes.
Si la création a évidemment précédé le titrage de cette musique, le nom de chaque morceau traite avec éloquence de l’art de la perception, de la façon dont un artiste traite ses propres découvertes et de l’influence que cela peut avoir sur l’interprétation de l’auditeur. En arrivant sur« Leaving« , par exemple, Pilc rumine et crée une aura d’anticipation. Ce faisant, il révèle une myriade d’émotions liées au processus de séparation. La question de savoir si la musique reste fixée sur le départ ou le retour à un lieu de réconfort n’est pas du tout claire. Mais une grande partie de la lutte pour cette question est, bien sûr, due à la nature même de l’association des titres.
Bien que les oreilles et les esprits puissent choisir de ruminer sans fin ce lien entre les noms et les sons, cela peut détourner l’attention de la substance de la musique. Et l’on ne peut nier la puissance de ce que Pilc a à offrir dans ce domaine. Avec « Discovery », le pianiste élargit un arc de possibilités en établissant des liens plus profonds avec le mouvement et la magie du temps et des conséquences. « The Encounter » s’installe dans un espace tendre et mélodieux, s’élève jusqu’à une tension maximale et offre un relâchement. « First Dance » passe d’un balancement stable à un jeu de doigts endiablé, puis à un jeu percussif avant de se calmer. Et « Just Get Up » s’ouvre sur la curiosité et grimpe l’échelle de l’intensité et de l’immensité avant de faire table rase du passé, de repartir à zéro et de repartir finalement dans la direction opposée.
« Way To Go », qui s’ouvre sur un glissando qui attire l’attention, embrasse une vaste histoire du jazz à la manière de Jaki Byard, tout en restant fidèle au langage unique de Pilc. « Understanding » hante avec le lent passage de vérités simples et de ce qui se cache derrière elles. Une « Valse pour Xose » captivante s’articule magistralement autour d’actes d’échange de soi. « Not Falling This Time » est un morceau de bravoure, qui met en valeur la virtuosité de Pilc dans des happenings à grande vitesse et séduit par des plaisanteries bluesy à plusieurs vitesses. Et le pianiste met un point final à tout cela avec l’entraînant « I’ll Be Back ». Merveilleusement imprévisible et tout à fait conforme au penchant de Pilc à s’investir pleinement dans chaque instant, Symphony est le cadeau d’un artiste en perpétuelle évolution. ~ par Dan Bilawsky, le 20 mars 2023. ToutSurLeJazz